3 questions à Nathalie Canieux

3 questions à Nathalie Canieux, Secrétaire générale de la Fédération CFDT Santé-Sociaux.

A votre avis, un code de déontologie pour les directeurs d’établissements de santé est-il important ?

Ma première réaction est évidemment une réaction d’intérêt. Je crois que nous sommes au début d’une vraie dynamique. Cependant, il ne faut pas se leurrer : c’est les actes qui seront déterminants. Est-ce que les directeurs auraient accepté de signer un texte disant exactement l’inverse ? Bien sûr que non. Pour autant, je suis convaincue que nous sommes au début d’un vrai mouvement de prise de conscience, qui monte, très doucement, mais qui monte. Aujourd’hui, les professionnels de santé, directeurs inclus, bénéficient d’un blanc-seing de l’opinion publique. Les critères de performance du secteur hospitalier sont dans l’ensemble toujours basés sur la qualité des soins portés à l’usager. L’appréciation des usagers est le critère de base qui régit le secteur de la santé, la performance est le quotidien du soin. Du moment que les soins prodigués sont des soins de qualité, on ne s’intéresse pas aux impacts économiques et écologiques du soin. On oublie un peu vite que les personnels soignants sont ceux qui portent la dégradation des conditions de travail. On peut être très bien soigné par un personnel à bout, usé, au bord de la dépression. Jusqu’ici le rapport est tel que la déontologie médicale est portée par le seul personnel de soin. Travailler dans un hôpital, c’est occuper une position stratégique : dans leurs salles d’attente, les personnels voient les conséquences de la dégradation des conditions de vie : la pauvreté, le chômage, les mauvaises conditions de travail débouchent droit à l’hôpital, la pollution aussi, qui crée de nouveaux cas d’asthme chez les enfants… Les hôpitaux sont des endroits très particuliers, on voit arriver tout le monde, et pourtant, c’est dur d’avoir pour soi-même une approche de prévention. Il y a aveuglement, alors même que l’on est au cœur du sujet. 

Que faites-vous en ce moment au sein de votre Fédération pour le développement durable en santé ?
Nous avons interrogé les équipes et les militants au sein de nos établissements sur le développement durable : les résultats sont édifiants. Sur 392 réponses, seuls 77 établissements ont un vrai plan d’action sur le développement durable. La plupart des thématiques traitées ont trait à la gestion des déchets, de l’eau, de l’énergie et à l’hygiène. Pas du tout à l’écoconception, par exemple. Autre trait marquant : la méconnaissance totale par les équipes CFDT des certifications du développement durable. Personne ne savait si son hôpital était certifié HQE, sans parler d’ISO 14001 ou EMAS ! Les instances représentatives sont pourtant théoriquement responsables de la promotion du développement durable. Enfin, il nous a semblé intéressant de noter aussi qu’interrogés sur les obstacles au développement durable dans le secteur de la santé, les acteurs ont souvent répondu : d’autres priorités. Parmi lesquelles ils citent : les conditions de travail et les risques psychosociaux, soit deux parties importantes du développement durable. Cela veut dire qu’ils sont vraiment passés à côté de ce que le développement durable peut apporter. Chacun travaille dans son coin, sans se consulter… On travaille sur l’hygiène, sans remarquer que cela améliore justement les conditions de travail ! Il reste un immense travail de pédagogie à accomplir.

Comment avez-vous connu le C2DS?
En 2009, lors de son Congrès, la Fédération CFDT Santé-sociaux a voté un texte axé entièrement sur la RSE, la responsabilité sociale des entreprises. Quand nous avons tenté de mettre ces textes en application, j’ai pris contact avec le président du C2DS, qui m’a dit que notre texte était en avance par rapport à la réalité du secteur de la santé. Je suis une ancienne technicienne de laboratoire, je connais bien ces questions. Quand on voit arriver le Grenelle II, je me dis qu’il faut qu’on se dépêche de changer les mentalités !