Système de santé : les dix propositions de la FHP-MCO pour sortir des déficits et préparer l’avenir

(communiqué de presse)

La FHP-MCO, fédération des cliniques et hôpitaux privés spécialisés en médecine, chirurgie, obstétrique, réclame un financement juste, responsable et équitable du système dans une plateforme présentée jeudi. Elle formule dix propositions de réforme du système de santé à court et moyen terme pour sortir des déficits et préparer l’avenir.

Dans cette plateforme « Sortir des déficits, préparer l’avenir : pour un financement équitable et responsable du système de santé », la FHP-MCO propose une perspective macro-économique du financement du système hospitalier. Elle pointe aussi les nombreux exemples de dysfonctionnements à l’hôpital épinglés par la Cour des comptes et les chambres régionales des comptes, afin de démontrer le surcoût imposé à la collectivité par l’organisation déficiente et les carences de gestion du secteur hospitalier public. Elle rappelle la discrimination à la fois sur le plan du financement et sur celui des autorisations d’activités que subit le secteur de santé privé en France.

« La santé est un thème majeur du débat de la campagne présidentielle. Il était important que l’hospitalisation privée puisse exprimer sa vision des réformes nécessaires pour sauver un système de soins menacé par les déficits, les gaspillages et l’absence de politiques cohérentes de santé publique. Il nous faut réformer le système pour garantir un système de financement pérenne dans l’intérêt majeur des patients et non plus s’accrocher à une vision clientéliste, passéiste et surtout dispendieuse. L’avenir est au dépenser mieux pour mieux soigner », souligne le président de la FHP-MCO, Lamine Gharbi.

Rappelant que les cliniques et hôpitaux privés subissent en France une discrimination sur le plan du financement, elle appelle à une profonde évolution des mentalités et des pratiques, avec dix axes de proposition : 

1 – PILOTER NOTRE SYSTEME DE SANTE AVEC JUSTESSE ET IMPARTIALITE

 Pour cela, on peut agir dès l’année 2012…

Les Directeurs généraux des Agences régionales de santé ont un double rôle de régulateur régional et de responsabilité de la bonne gestion des établissements de santé publics. Par nature, ils ne peuvent pas être justes et impartiaux dans leurs choix.

Il est urgent de mettre fin à cette dualité de fonction. Il est nécessaire de disposer d’agences régionales régulatrices indépendantes.

Mieux encore, le pilotage national doit être assurée par une Agence Nationale de la Santé.

2 – FINANCER NOTRE SYSTEME DE SANTE DE MANIERE JUSTE ET LISIBLE

 Pour cela, on peut agir dès le PLFSS 2013…

Ces dernières décennies, la politique de financement du système de santé n’a été rien d’autre que celle du « ni ni » ou, dit autrement, une absence totale de politique claire, passant d’une logique de mutualisation, gérée de manière paritaire, à une logique d’universalisation des prestations et de fiscalisation, contrôlée par le Parlement et l’Etat.

Il est temps aujourd’hui de faire le choix d’une véritable politique de financement de l’assurance maladie. Cela passe par la nécessité de changer notre système de financement en arrêtant une modalité moins sensible aux aléas de la vie économique, notamment de l’emploi. L’ONDAM est aujourd’hui respecté. Et, cependant, le déficit est encore bien présent. Partant du principe que le besoin de la dépense publique de l’assurance maladie est globalement bien évalué, il convient maintenant de s’attaquer à la stabilité de son système de financement. La fiscalisation est-elle la solution ? Il convient également de déterminer le véritable rôle des organismes complémentaires.

 

3 – ETABLIR DES POLITIQUES DE SANTE PUBLIQUE COHERENTES ET FINANCEES

 Pour cela, on peut agir dès l’année 2012…

Si les politiques de santé publiques ont le mérite de donner un sens aux actions conduites par les professionnels de santé, il n’en demeure pas moins que celles-ci doivent être coordonnées en veillant notamment à :

– faire tomber les frontières ville/hôpital,

– les prioriser,

– les évaluer sur le plan médico-économique,

– les accompagner par des incitations, notamment financières, indispensables pour garantir le nécessaire lancement de ces opérations.

Plan Cancer, Plan Alzheimer, Plan Soins Palliatifs, Plan ICRT, Plan Obésité, etc. Autant de plans qui nécessitent une cohérence, une évaluation avec des indicateurs adaptés, c’est-à-dire des indicateurs de processus et mieux encore de résultats.

 

4 – GARANTIR L’ACCES AUX SOINS POUR TOUS

 Pour cela, on peut agir dès l’année 2012…

Être en mesure de garantir à chacun de ses concitoyens un égal accès aux soins pour tous doit être la priorité de tout Etat démocratique. Cet objectif doit aujourd’hui prendre en compte deux problématiques majeures :

– l’accès aux professionnels médicaux

– l’accès à des plateaux techniques de proximité.

La première pose la question des conditions d’installation des praticiens. Faut-il transposer les modalités applicables aux infirmiers libéraux qui ne sont pas conventionnés en territoires qualifiés de « sur-dense » ? La présence de praticiens médicaux est d’autant plus importante que leur absence sur un territoire conduit très souvent à une absence des professionnels paramédicaux. L’accès aux professionnels médicaux renvoie aussi aux débats sur le partage des tâches médicales (cf. infra).

Cela pose aussi la question de la régulation du secteur 2 (permettant les compléments d’honoraires). Le dispositif actuel prévu par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012 qui prévoit la création d’un secteur optionnel (où les compléments d’horaires seraient limités et socialisés) ne répondra pas aux attentes des praticiens libéraux).

La deuxième met en avant la question (en plus de celle portant sur les difficultés de recrutement de professionnels médicaux) de la politique tarifaire des établissements de santé. A tire d’exemple, le niveau tarifaire des accouchements est fixé de tel manière que le point d’équilibre économique est situé à, environ, 1 100 accouchements par an. Comment maintenir les «petites» maternités dans ces conditions ? Quelles sont les alternatives à une politique tarifaire nationale pour les établissements de santé de proximité ? Y-a-t-il une modalité de financement complémentaire possible ? Si oui, laquelle ? Une enveloppe MIGAC ? Un accompagnement spécifique et individualisé est à notre sens la seule réponse pragmatique à apporter.

 

5 – DEVELOPPER L’EFFICIENCE COLLECTIVE ET INDIVIDUELLE

 Pour cela, on peut agir dès l’année 2013…

Plus que jamais, dans un environnement soumis à la double contrainte de la démographie médicale défavorable (1 praticien sur deux ne sera pas remplacé dans les années à venir) et de la capacité financière de notre système d’assurance maladie, la volonté de maintenir un système de santé accessible pour tous doit nous inviter à rechercher l’efficience collective et individuelle.

Cela passe par le partage des actes médicaux. La standardisation et la sécurisation des procédés d’investigation et de traitement, tout comme l’encadrement des décisions par les guides de bonnes pratiques, viennent renforcer la thèse d’un partage des tâches médicales répondant ainsi à une nécessité médico-économique incontournable.

Au-delà des corporations actuelles, afin de répondre à cet impératif d’accès pour tous, il est essentiel de développer les outils permettant de répartir les tâches, de développer de nouveaux métiers. Une remise à plat des délégations de tâches est aujourd’hui urgente si notre objectif commun et partagé est de garantir l’accès de soins à tous.

Il y a un autre acteur de la santé auquel des tâches simples pourraient être déléguées : le patient. Celui-ci cherche à savoir et à peser sur les décisions qui le concernent au premier chef. A titre d’exemple, l’éducation thérapeutique comme le développement des instruments de contrôle vont bouleverser le rapport du patient à sa propre maladie et au médecin qui le prendra en charge. Suivre sa tension artérielle, le rythme électrique de son coeur, le taux de sucre dans le sang,… devrait devenir chose courante dans les années à venir.

Il nous faut maintenant remettre en cause la chose la plus difficile … nos habitudes, nos convictions, nos certitudes professionnelles et organisationnelles.

 

 

 6 – ACCELERER LA CONVERGENCE TARIFAIRE INTERSECTORIELLE

 Pour cela, à moyen terme… A l’horizon 2018

Les tarifs issus de la « Tarification à l’Activité » (T2A) financent les activités de soins des établissements de santé publics et privés. Les autres missions qui leur sont confiées (comme l’enseignement, la recherche, la permanence des soins) sont financées par des budgets spécifiques qui viennent se rajouter aux tarifs (MIGAC, MERRI, etc.)

– Il est nécessaire de déterminer le modèle de convergence tarifaire des secteurs public et privé car les modalités tarifaires actuelles de financement divergent de par les différences statutaires des praticiens qui y exercent.

– L’économie attendue d’une convergence tarifaire entre secteur public et privé est de l’ordre de 7 milliards d’euros selon le rapport de la Cour des comptes de septembre 2011. La disparition brutale n’est pas raisonnable. Il convient dès lors de créer une enveloppe dédiée au surcoût de l’hôpital public (7 milliards d’euros) qu’il faut figer dans un premier temps et, dans un deuxième temps, veiller à sa décroissance régulière dans les 10 années à venir.

Pour cela, à court terme, dès 2012,… chaque année :

– La convergence tarifaire ciblée doit être poursuivie et amplifiée afin de produire au moins 250 millions d’euros d’économies (contre 100 M€ prévu en 2012, ce qui est insuffisant).

 

 

7 – REQUALIFIER LES MIGAC* SOUS FORME TARIFAIRE

 Pour cela, on peut agir dès l’année 2012…

Cette enveloppe d’un montant annuel de 8,3 milliards d’euros a été multipliée par deux en six ans. Cette enveloppe équivaut au budget total annuel de l’hospitalisation privée. Une grande partie est totalement injustifiée et vient aujourd’hui alimenter sous forme de subvention déguisée les contrats de retour à l’équilibre des établissements de santé publics. Lorsque les objectifs d’équilibre budgétaire seront atteints, c’est autant de marges de manœuvre (près d’un milliard) qui doivent être réinjectées dans une politique tarifaire.

(* Mission d’intérêt général et d’aide à la contractualisation – définition : dotation ciblant des actions spécifiques non financées par les tarifs)

8 – DEVELOPPER UNE POLITIQUE DE FINANCEMENT DE LA QUALITE

 Pour cela, on peut agir dès l’année 2012…

La politique conduite depuis des années vise à soutenir les établissements en difficulté en injectant régulièrement et sans fin des allocations de ressources complémentaires. Ceux qui sont efficients et qui font des efforts sur les ressources s’en trouvent pénalisés. Il est temps d’inverser cette logique infernale.

Il faut conduire une démarche « promotionnelle » et non plus « compassionnelle ». Il convient de motiver les meilleurs et non de soutenir ceux en difficulté.

Dès février 2012, nous proposons un modèle fondé sur des indicateurs issus de l’exploitation des bases de données PMSI décrivant les pathologies prises en charge (sur la base d’une expérimentation portant sur cinq pathologies). Nous démontrerons que c’est possible de prendre en compte le résultat attendu.

9 – LEVER LES CONTRAINTES REGLEMENTAIRES DE FONCTIONNEMENT APPLICABLES AUX ETABLISSEMENTS DE SANTE

 Pour cela, on peut agir dès l’année 2012…

 

– Adapter les contraintes réglementaires obsolètes

Les établissements de santé privés et publics sont encore sous le régime des obligations de moyens très souvent inadapté à la réalité de prise en charge des soins au sein des services hospitaliers. Les moyens doivent pouvoir être adaptés en fonction des pathologies réellement prises en charge.

Il est temps d’adapter les contraintes réglementaires obsolètes qui datent, pour certaines, de 1956 et ne tiennent pas compte des progrès médicaux et technologiques. Dans un environnement contraint sur le plan économique et dans le cadre de politiques de santé publique incitatives, il est maintenant impératif d’apporter aux établissements de santé de la souplesse de gestion leur garantissant une réactivité plus grande face à l’évolution de leur environnement mais également une efficience accrue.

A titre d’exemple, alors que le développement de la chirurgie ambulatoire est une priorité nationale, il faut mettre fin aux contraintes normatives en personnel de moyens comme organisationnelle (ouverture de 12h00, …etc). Il faut parler de présence de compétence infirmière sans en préciser le nombre. Libre à chaque responsable d’établissement d’apprécier la juste charge de travail et d’en déduire les moyens à mettre en oeuvre.

Ou bien encore procéder à la publication et à la mise en oeuvre de textes approuvés par l’ensemble des professionnels hospitaliers publics et privés portant sur les conditions d’implantation et de fonctionnement des services de médecine et de chirurgie.

– Simplifier les procédures administratives d’autorisation

Les établissements de santé sont soumis à de nombreuses contraintes administratives en matière d’autorisation d’implantation et de fonctionnement.

Il conviendrait aujourd’hui de simplifier ce droit en rapportant ces dispositions par établissement et non plus par nature d’activité. Ainsi, au lieu de gérer souvent plus de dix dossiers d’autorisation par établissement, un seul dossier pourrait suffire à gérer la relation tutelle/établissement.

10 – MAINTENIR UN SYSTEME CONCURRENTIEL, Y COMPRIS SUR LES MISSIONS DE SERVICE PUBLIC

 Pour cela, on peut agir dès l’année 2012…

Les établissements de santé privés sont présents sur tous les domaines d’activité.

Les difficultés majeures rencontrées par les établissements de santé publics ne doivent pas conduire les tutelles à conduire des actions visant à les privilégier dans l’octroi des autorisations, de reconnaissance d’activités ou de missions de service public.

Or, depuis la mise en place de la tarification à l’activité, il y a trop de situations où malgré la prédominance d’une activité dans le secteur privé sur un territoire, la tutelle adopte une attitude dogmatique de « préférence du secteur public » en octroyant les autorisations au secteur public.

Il en est de même pour les missions de service public de permanence des soins, de formation des internes, etc.

Une telle attitude d’« hospitalocentrisme » constitue une erreur grave à moyen et long terme car tout acteur économique se trouvant en situation de monopole est globalement moins performant et efficient et aussi plus coûteux qu’un acteur économique dans un environnement concurrentiel.

Qui plus est, en cas de crise sanitaire, les risques sont mieux maîtrisés si les autorités de tutelles disposent d’alternatives d’actions.