Dr Philippe Cuq, président de l’Union des Chirurgiens De France (UCDF) et co-président de Le Bloc

Le colloque annuel de Le Bloc se tiendra le 15 décembre prochain à Paris, quel est votre programme ?

Nous avons souhaité une approche transversale autour du patient opéré aujourd’hui et demain avec, au terme de la matinée et de l’après-midi, le regard de trois générations d’acteurs du bloc opératoire et la participation de l’académie de Chirurgie.

Nous évoquerons la formation : est-ce que la réforme du 3cycle permettra de maintenir une formation de qualité dans chaque spécialité, en maîtrisant toutes les techniques opératoires (chirurgie ouverte, cœliochirurgie, robotique, endovasculaire…), comme le permettait la durée de l’internat et du clinicat ? Autre sujet, le décret IBODE nous pose des soucis car il va bloquer les plateaux opératoires à partir de juin 2019. Les IBODE seront là pour exposer leurs propositions, que nous soutenons pour la plupart.

Nous parlerons bien sûr de l’innovation technologique et de son financement. Les techniques de modélisation pré-opératoire sont passionnantes et vont être très utiles dans certaines chirurgies (foie, poumon, rein… ).

Nous nous interrogerons également sur l’évolution de nos assurances individuelles RCP vers une assurance d’équipe ou d’établissement. Avoir le même assureur que l’établissement de santé nous paraît extrêmement dangereux.

Comment voyez-vous l’avenir de votre profession ?

Les métiers du bloc opératoire évoluent considérablement sur le plan technique, sur le mode d’hospitalisation, sur la relation avec les patients et sur la relation avec les établissements. Aurons-nous demain les moyens techniques et humains de garantir à tous les patients les exigences de qualité et de sécurité que nous leur devons ?

Nous interrogerons bien sûr Nicolas Revel qui sera présent l’après-midi. Pense-t-il que le paiement à l’acte soit indispensable pour l’activité chirurgicale ? Nous interrogerons le président de la FHP pour connaître sa stratégie après 8 années de baisse tarifaire des GHS pour les établissements et ses conséquences sur les politiques d’investissement et les relations contractuelles avec les médecins libéraux. Cet avenir, je le vois préoccupant, en particulier pour la chirurgie libérale soumise à des contraintes toujours plus nombreuses.

Les chirurgiens et les anesthésistes ont la responsabilité de l’acte et de la prise en charge du patient. La qualité de la prise en charge et du geste technique demeurent essentielles. Je voudrais également dire que le grand risque est aujourd’hui la perte d’humanité. Préserver l’humanité et garder ce lien de confiance avec le patient opéré dans ce monde hyper technologique et hyper financier me paraît essentiel.

La réforme des autorisations vise à graduer les soins. Comment voyez-vous évoluer la place des chirurgiens ?

Nous ne souhaitons pas des centres de chirurgie de différents niveaux, comparables aux maternités. Défendons plutôt des équipes opératoires avec des chirurgiens et des anesthésistes bien formés sur tout le territoire. Il restera bien sûr la place pour les centres de référence et d’expertise dans les pathologies et techniques moins courantes. La formation initiale, ce que nous appelons « éducation chirurgicale », est essentielle pour garantir la qualité et la sécurité des patients.

Nous devons défendre et promouvoir des projets médicaux innovants, associant humanité, technicité, performance et qualité. Nous avons pour cela besoin de pérennité, de sérénité et d’équipes opératoires stables et solides. Comment voulez-vous faire des soins de qualité avec du personnel intérimaire ? Enfin, il y a une notion de taille et d’activité. Il faut arriver à un certain seuil d’activité pour être performant, mais franchi ce seuil, on en fait trop et sûrement moins bien. Je pense que le secteur libéral a cette carte « qualité et personnalisation » à jouer. Le regroupement des établissements et les politiques financières vont déstabiliser nos atouts. Le patient opéré aujourd’hui et demain souhaite être pris en charge par une équipe soudée, à taille humaine, avec une activité importante, mais ne souhaite pas être pris en charge par une usine déshumanisée, avec des soignants anonymes.

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