IBODE : l’impossible échéance

Les inscriptions au régime dérogatoire ouvert aux IDE non IBODE se clôturait jeudi dernier. Vous avez été très nombreux à témoigner de la complexité démesurée du dispositif et de la confusion dans laquelle il est mis en pratique. Aucun territoire ne semble épargné et chacun livre autant de cas particuliers auxquels la Tutelle ne répond pas, ou de façon imprécise, laissant la voie à une interprétation régionale. Un tel comportement des autorités en charge du dossier apparaît  incompréhensible au regard des menaces de contentieux et de mouvements sociaux qu’il génère.

À moins de 9 semaines de l’entrée en vigueur pleine et entière du décret du 27 janvier 2015 réservant tous les actes d’assistance opératoire aux seuls IBODE, il n’existe pas de professionnels diplômés en nombre suffisant au regard de l’activité chirurgicale, et le régime dérogatoire tel que prévu à ce jour ne permet pas d’y remédier. Nous n’avons eu de cesse d’alerter nos interlocuteurs ces derniers mois sur les enjeux à très court terme. Mais ce message porté avec force et insistance par la FHP, la FHP-MCO, les FHP régionales et les centaines de cliniques et hôpitaux privés, chacun à ses interlocuteurs, n’est PAS ENTENDU.

À cela se rajoute la confusion la plus totale dans la mise en œuvre du régime dérogatoire. Les Préfets de région, par l’intermédiaire des Directions Régionales de la Jeunesse des Sports et de la Cohésion Sociale, se sont vu confier la charge de délivrer les autorisations, mais ils n’y étaient manifestement pas préparés ! Boîtes mail saturées adressant aux candidats des messages d’impossibilité de déposer leur dossier, rejet de dossier au motif que le candidat n’a pas travaillé pendant 2 mois, absence de délivrance formelle d’autorisation, ou encore délivrance d’autorisation pour une durée déterminée… autant de problèmes qui sont remontés au fur et à mesure à la Tutelle. Nous avons besoin urgemment du cadre juridique et technique précis des mesures dérogatoires, applicable sur tout le territoire national, qui garantisse le maintien dans l’emploi en toute légalité des professionnels IDE en place et une équité de traitement de l’ensemble des candidats.

La saturation du dispositif laisse penser que les candidats ayant déposé leur dossier ne passeront pas l’épreuve de vérification des connaissances avant plusieurs mois, voire plusieurs années. Pour autant, cela ne semble poser aucun problème de sécurité des soins. Pourquoi alors ne pas ouvrir en continu jusqu’à fin 2021 le régime dérogatoire à tous les IDE non IBODE qui justifieront, au fur et à mesure, d’une année d’expérience professionnelle au bloc opératoire avec la pratique régulière des actes du 1b) ? Les établissements pourraient ainsi continuer à former des IDE au bloc et pourvoir au remplacement de ceux qui partent, tandis que parallèlement le dispositif VAE et le nombre de diplômés monteraient en puissance. Le syndicat a également été force de propositions sur les enjeux du moyen terme, mais l’écoute n’est pas au rendez-vous.

La situation est ubuesque. La responsabilité des directeurs d’établissements MCO, au regard de l’exercice irrégulier d’une profession de santé réglementée, risque d’être engagée. Au 1er janvier prochain, nombre d’entre nous, acculés par des textes inapplicables par manque d’anticipation de la Tutelle, devront choisir entre privilégier une continuité de service de soins à la population et respecter la réglementation. Et quand bien même nous réussirions à faire fonctionner nos blocs au 1er janvier, nous rencontrerons ce dilemme à chaque nouveau départ d’IDE au bloc opératoire. Une situation subie, inédite, qui n’est pas tolérable.

Ségolène Benhamou
Présidente de la FHP-MCO