3 questions au Pr. Guy Vallancien, urologue, Président du Cercle Santé et société.

Pr. Guy Vallancien, urologue, Président du Cercle Santé et société.
Guy Vallancien
Le financement de la santé est-il durable ?
Bien sûr ! S’il y a une chose dont on est certain, c’est la santé continuera d’être financée. Les modes vont varier, car le déficit est considérable, mais une somme élevée continuera d’être attribuée à ce domaine. Avec du courage et de la rationalité, on devrait y arriver ! La Sécurité sociale est financée à hauteur de 200 milliards, ce n’est pas rien. Je suis certain que l’on pourrait supprimer 30 milliards sans qu’il n’y ait de conséquences dramatiques en taux de mortalité pour la population ! Le problème est qu’il y a d’énormes déperditions. Les administrations, les médecins, les patients, chacun à son niveau pompe le système, il est temps de repenser les choses. Pourtant, c’est jouable, il suffirait que la croissance reparte pour s’extirper de ce contexte de morosité. Le cercle Santé Société réfléchit à des propositions innovantes pour le financement de la protection sanitaire.
Comment mieux définir des stratégies de santé ?
Première étape : il faut passer d’une médecine artisanale, telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, à l’ère de l’industrialisation. Contrairement aux idées reçues, cela ne signifie pas déshumaniser la médecine, mais au contraire, dégager du temps pour la rendre plus humaine. Aujourd’hui, tout le monde fait tout à la fois, c’est anarchique, et dans tout autre secteur, une telle désorganisation serait immédiatement sanctionnée. La loi HPST a été une maigre tentative pour mettre un peu d’ordre dans tout cela, mais elle n’a pu être menée à bien. Les maisons de santé doivent se développer encore, et les perspectives sont bonnes grâce au soutien des Sisa, les sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires, qui vont accélérer leur implantation. Aujourd’hui, les médecins ne peuvent plus travailler seuls : tous les jeunes veulent s’installer en équipe, le modèle du médecin multitâche qui veut tout accomplir et finit en burn-out a fait long feu. Il faut profondément repenser l’offre de soin en fonction de ces impératifs. Pourtant, quand on effectue des comparaisons européennes, on se rend compte que notre système est loin d’être mauvais.
À quoi ressemblera la médecine du futur ?
À tout ce à quoi on ne pense pas ! Tout d’abord, il y aura une plus grande concentration des moyens humains. Ensuite, nous sommes à l’aube d’une véritable révolution, celle de la génomique. Cela implique que les plateformes informatiques auront un rôle majoré, avec des grands pôles mixant des milliards d’informations à la seconde. Aujourd’hui, la plupart des tâches médicales pourraient être prises en charge par des gens qui ont un niveau d’étude de bac + 3. Elles sont faites par des gens qui ont un bac +12 ! De nouveaux métiers vont également émerger, avec des ingénieurs opérateurs qui travailleront avec les chirurgiens. Les médecins auront un rôle de coordonateur. La prévention et le diagnostic seront également beaucoup plus importants, et cela va engendrer des changements dans la caste médicale, qui se considère là pour soigner, pour guérir et non pour prévenir. Le diagnostique précoce est extrêmement utile dans le traitement des maladies, et il va falloir en tenir compte !