3 questions à Dr Richard Mallet, chirurgien urologue, cancérologue et président de CME au Centre médico-chirurgical Les Cèdres, à Brive-la-Gaillarde (19).
Nous avons commencé par rencontrer Bernard Combes, maire de Tulle et conseiller technique à l’Élysée, puis, le week-end dernier, le Dr Gravier, gynécologue, membre du Syngof et moi-même, avons eu une heure d’entretien avec Michel Yahiel, conseiller travail, emploi et protection sociale auprès du Président de la République. Enfin, nous avons brièvement rencontré le chef de l’État, François Hollande, avec notre directrice Isabelle Bielli-Nadeau.
Comment se sont déroulés ces entretiens ?
Nous avions beaucoup d’inquiétudes, certaines ont été levées, d’autres non, mais nous avons pu les faire remonter dans un esprit constructif. La première tenait à la réalisation pratique du tiers payant généralisé (TPG). Nous devons déjà faire face à une charge administrative importante, et devoir l’augmenter encore nous semblait impossible. Le conseiller nous a expliqué que le TPG ne génèrerait aucune activité supplémentaire pour nous, et que nous serions toujours payés dans un délai imparti. D’après lui, une frange de la population limite ses soins médicaux à cause de l’absence de tiers-payant, et ce malgré la CMU et l’accès aux soins relativement simple dans notre pays. Notre deuxième inquiétude liée au tiers-payant généralisé tenait aux risques de surconsommation de soin, les patients n’ayant plus aucune visibilité sur le coût de la santé. Le conseiller estime, quant à lui, que les Français vont se montrer plutôt raisonnables… L’avenir nous le dira ! Ensuite, nous avons tenu à rappeler que la mainmise des ARS sur toutes les missions de service public pouvait être dangereuse, surtout dans des spécialités comme la cancérologie. Michel Yahiel nous a expliqué qu’il s’agissait plutôt d’une prise en charge au tiers-payant des patients dans les spécialités qui rentraient dans le cadre d’une mission de service public, allant dans le sens d’une accessibilité améliorée. Enfin, nous craignons que le TPG, dans la mesure où l’on n’a pas de visibilité sur qui paie quoi, laisse sur le long terme une place beaucoup plus importante aux mutuelles dans le financement de la santé, avec le risque d’établir des remboursements à deux vitesses et des niveaux de praticiens en fonction des niveaux de contribution. Sur ce point, que Michel Yahiel considère appartenir à la fiction, nous n’avons pas réellement pu être rassurés. Enfin, nous avons souhaité que l’université s’ouvre aux praticiens du secteur privé, surtout en ce qui concerne la formation des internes.
Avez-vous abordé la question des dépassements d’honoraires ?
Nous avons cité une étude de 66 millions d’impatients, qui montre que les dépassements d’honoraires sont beaucoup plus importants dans le secteur public que dans le secteur privé, et notamment sur certains actes, comme la chirurgie de la prostate. Nous avons rappelé que la majeure partie des praticiens de secteur II pratiquait le tact et la mesure, et fournissait une médecine de qualité à bon marché. C’est le cœur de notre métier. Nous avons également fait part de notre souhait de voir lancer un vrai débat de fond sur l’avenir du système de santé, dans lequel les médecins de campagne seraient aussi consultés. Pour François Hollande, les maisons de santé, qu’il avait déjà évoquées dans son discours, vont dans ce sens. Lorsque nous avons rencontré François Hollande, nous avons eu l’impression qu’il avait pris acte de ce que lui avait transmis son conseiller ; et nous espérons éventuellement que la Présidence puisse intervenir pour débloquer les négociations stagnantes avec Marisol Tourraine. Nous avions, en tout cas, une volonté commune de sauver notre système de soin, et de rester constructifs !