Jean Leonetti, député UMP des Alpes-Maritimes, rapporteur de la loi de 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie. Des propos recueillis en perspective de la Journée des soins palliatifs, organisés par la FHP-MCO le 10 février, au cours de laquelle il interviendra.
Où en est-on aujourd’hui en France sur la question de la fin de vie ?
Grâce aux progrès de la science nous avons gagné, sur la deuxième moitié du 20e siècle, plus de dix ans d’espérance de vie. Mais malgré les lois de 1999, 2002 et 2005, la souffrance en fin de vie persiste, et il ressort de toutes les études récentes que les patients considèrent que leur parole à ce moment-là n’est pas entendu. C’est la raison pour laquelle nous devons améliorer la loi de 2005.
Dans quel sens vont les réécritures de la loi de 2005 ?
Notre travail à la suite du rapport du professeur Sicard et du Comité consultatif national d’éthique nous amène à deux propositions : la première est d’avoir le droit de dormir avant de mourir pour ne pas souffrir. La deuxième concerne les directives anticipées. Jusqu’ici, les Français devaient remplir un document avec leurs souhaits de prise en charge de fin de vie, pour le cas où ils ne seraient plus en état d’exprimer leurs volontés. Ces documents, s’ils ont le mérite d’exister, sont peu utilisés et sont seulement consultatifs. Aujourd’hui, nous souhaitons les rendre plus contraignants afin de mieux respecter la volonté du malade. Le médecin peut cependant émettre un avis contraire, conformément à son expertise médicale, mais cet avis doit être confirmé par un confrère. Enfin, les directives anticipées ne peuvent pas s’appliquer en cas d’urgence vitale. Il n’y a donc pas de révolution de la loi de 2005, simplement une évolution pour la rendre plus efficace : on passe d’une loi de devoirs des médecins à une loi du droit des patients. Dans les textes tels qu’ils sont conçus jusqu’ici, le médecin avait le devoir de soulager le patient. Aujourd’hui, c’est le patient qui a le droit d’être soulagé. La discussion tourne toujours autour de modifications législatives, mais la vie humaine et la pratique médicale ne se résument pas à des textes de loi. Il faut qu’une culture palliative imprègne toute la vie médicale et pas seulement dans les aspects qui touchent à la fin de vie.
Qu’est-ce qui a changé dans les pratiques, et que pourrait-on encore améliorer ?
En dix ans, j’ai pu observer une véritable révolution des pratiques médicales en fin de vie. Il y a quelques années encore les médecins étaient extrêmement réticents à utiliser des antalgiques et des sédatifs en fin de vie. La loi est claire aujourd’hui : en fin de vie la qualité de vie prime sur la durée de la vie. Il en est de même sur l’arrêt des traitements en réanimation qui peut s’effectuer de manière collégiale lorsqu’ils apparaissent comme une obstination déraisonnable. Il n y a pas de risque juridique ou moral à agir de la sorte. En revanche, je continue à rencontrer des personnes qui déclarent qu’en toute fin de vie, leurs parents présentaient une souffrance importante qui n’a pas été prise en charge médicalement. Cette situation n’est pas acceptable compte tenu de la loi et des moyens médicaux à notre disposition qui peuvent aller jusqu’à la sédation en phase terminale pour empêcher cette souffrance.