3 questions au Dr José Brasseur et à Hervé Gourgouillon

A l’occasion de la semaine nationale du rein, parole au président nouvellement élu du Syndicat des néphrologues libéraux (SNL), Dr José Brasseur, Polyclinique de Bois Bernard (62), et au directeur général de Diaverum France, Hervé Gourgouillon.

Quels sont les enjeux principaux pour les néphrologues en France aujourd’hui ?
Dr José Brasseur : parmi les néphrologues, la démographie s’améliore un peu grâce à une alerte lancée par les professionnels dans les universités il y a quelques années. Cette campagne porte ses fruits et nous sommes moins touchés par la pénurie que d’autres spécialités. De nombreux jeunes néphrologues sont actuellement en formation. Un autre enjeu est aussi de maintenir l’attractivité de la néphrologie à travers l’intérêt de l’activité médicale d’une part, mais aussi à travers les honoraires bien entendu. Au niveau de la qualité des traitements, nous sommes très inquiets de constater la baisse des forfaits pour les traitements en centre de dialyse. Le ministère a d’ailleurs annoncé un nouveau recul important des tarifs et ressources alloués aux traitements. Si pour l’instant, nous avons réussi à épargner les patients en négociant avec les laboratoires et les fournisseurs, la tendance actuelle de rogner toujours plus sur les moyens accordés aux traitements des insuffisances rénales nous alerte. Depuis les états généraux du rein nous le rappelons : nous sommes en faveur du développement des traitements hors-centre et des transplantations rénales, mais il ne faut pas oublier les patients en centre, dont les plus âgés souffrent de plusieurs maladies, et qui ne peuvent être autonomes. Enfin, une autre préoccupation de la profession concerne l’actualité liée à la loi de santé et surtout le Service public hospitalier : le schéma actuel du gouvernement favorise l’attribution de matériaux lourds dans les hôpitaux publics. Le secteur privé sera de fait exclu, c’est inadmissible !

Quels sont vos projets au sein du SNL ?
Dr José Brasseur : comme je suis secrétaire général du Syndicat des néphrologues libéraux depuis 1999, je compte m’inscrire dans la continuité de notre action syndicale. Je veux maintenir l’attractivité du métier de néphrologue libéral, tant au niveau intellectuel et médical que par rapport aux honoraires. J’envisage d’ailleurs la « rémunération sur objectifs de santé publique » comme l’une des possibilités de diversification de la rémunération des néphrologues libéraux. La qualité des traitements en centre est également au cœur de mes priorités car nous observons beaucoup de vents contraires étant donné la politique actuelle. Enfin, il y a aussi l’objectif de développer les traitements hors-centre pratiqués par les néphrologues libéraux : je souhaite permettre aux praticiens libéraux de pouvoir offrir toutes les méthodes de traitements. Depuis les années 1980, la dialyse en centre est principalement prise en charge par les structures hospitalières à but non lucratif. Je voudrais que les néphrologues libéraux, leurs associations et les établissements de dialyse privés puissent délivrer tous les traitements hors-centre. Pour l’instant il existe de nombreux verrous règlementaires à faire sauter. Il faut simplifier les règles !

Quels sont les enjeux majeurs auxquels est confrontée la dialyse dans les cliniques privées en France aujourd’hui ?
Hervé Gourgouillon : les établissements privés de dialyse sont tous en secteur 1, je pense donc que les problématiques sont les mêmes pour le privé et le public. Le principal défi auquel nous sommes confrontés, ce sont les difficultés liées à la prise en charge des patients dialysés. En effet, l’âge moyen de nos patients est de 70 ans, ils sont fréquemment atteints de différentes pathologies gériatriques. Chaque année, la moyenne d’âge des patients augmente et contrairement au souhait de la HAS, nous ne sommes pas en mesure de traiter davantage de patients en ambulatoire, mais à l’inverse nous constatons qu’il y a de plus en plus de patients en centre lourd. Cela nécessite donc plus de personnels, et cela génère des coûts. Or, nous sommes actuellement dans un univers déflationniste : d’une part la dynamique allant du chronique à davantage de prise en charge, avec des patients atteints de polypathologies, est irrémédiable. De l’autre côté, nous assistons à un choc tarifaire puisqu’au total pour la dialyse privée, nous subissons une baisse de 4,79 % ! Dans un environnement très règlementé, avec un principe de précaution poussé à l’extrême, nous nous demandons ce que nous pouvons faire ! Nous n’avancerons pas si nous nous contentons d’organiser une fête une fois par an. Il faut de véritables mesures pour améliorer la prise en charge parfois pluridisciplinaire des patients dialysés.