Crise ? Non, mutation

Nous utilisons parfois des mots qui ne ciblent pas les bons maux. Nous parlons souvent de « la crise » que nous traversons, marquée par de très fortes restrictions budgétaires. Mais une crise se caractérise par sa soudaineté, sa brutalité, par un moment difficile avant de revenir à une situation ante.

Vous conviendrez que cela fait des années que nous affrontons les difficultés, que l’évolution de l’ONDAM baisse chaque fois davantage, que nous sommes in fine face à une mutation profonde de notre système de santé et de financement. Dans ce contexte, plus de 8 directeurs sur 10 jugent la situation des établissements de santé privés insatisfaisante … et restent pessimistes à court et moyen terme (cf. sondage IPSOS- FHP-MCO).

En tant que directeurs, notre responsabilité est de relever la tête pour envisager l’avenir de la prise en charge en santé dans notre pays, en préparant nos entreprises. En tant que syndicalistes, notre rôle est de veiller notamment à ce que nous ne soyons pas écartés des mesures prises par nos gouvernants pour accompagner cette mutation.

Et si nous avions des raisons de positiver pour appréhender le virage vers la médecine de demain ?

La médecine de précision est annoncée : le plan France médecine génomique 2025 devrait permettre à l’horizon 2020 de proposer 220 000 à 230 000 séquençages de génomes par an. Les maladies prioritaires seront les maladies rares et les cancers au stade métastatique. L’État y met les moyens en débloquant 670 millions d’euros et propose 14 mesures.

Si nous avons pris le virage ambulatoire et réalisons la même activité avec un tiers de lits en moins, une deuxième vague se présente à nous, beaucoup plus ambitieuse, et n’en est qu’à ses débuts.

La santé rentre progressivement dans l’ère des objets connectés créant une nouvelle chaîne de valeurs. Le patient devient plus autonome et l’innovation des entreprises régénère les solutions médicales et inversement.

Les médecins privilégient de plus en plus l’exercice collectif à l’individualisme, une posture encore davantage plébiscitée par les jeunes qui attendent aussi une autre qualité de vie sociétale et familiale.

La France entre dans le groupe des pays en voie de vieillissement. Les plus de 60 ans, qui représentent 15 millions de personnes, seront 20 millions en 2030 et 24 millions en 2060. La filière de la Silver économie est en plein essor et le marché dépassera les 130 milliards d’euros en France en 2022.

Ce que nous percevons comme une crise est en réalité une mutation profonde de nos sociétés. De nombreux experts remettent au goût du jour les théories schumpetériennes selon lesquelles « Le nouveau ne sort pas de l’ancien, mais apparaît à côté de l’ancien, lui fait concurrence jusqu’à le ruiner ». Dit autrement, dans une économie en mouvement, c’est aux entrepreneurs d’imaginer la combinaison de plusieurs facteurs qui vont constituer une innovation.

Pour y parvenir, il nous faudra sans doute « apprendre à désapprendre ». Nous soumettons à votre sagacité la vidéo ludique mais sérieuse vue plus de 13 millions de fois, dans laquelle un ingénieur apprend à désapprendre à faire du vélo. Elle est riche d’enseignements sur notre apprentissage de la vie, sur notre capacité à changer, sur la nécessité d’une reprogrammation de nos neurones. Visionner la vidéo

Bonne réflexion !

Ségolène Benhamou
Présidente FHP-MCO