Dr Jean-Philippe Masson, Radiologue, président de la Fédération Nationale des Médecins Radiologues (FNMR)

Concrètement quelles conséquences les baisses de vos tarifs auront-elles sur votre métier ?

Cette décision a un impact direct sur l’accès des patients à l’imagerie. Je nous donne une année pour en voir les effets. L’impact portera tout d’abord sur les capacités d’investissement des structures qui possèdent les équipements d’imagerie, scanner, IRM, etc. et donc une baisse de qualité des équipements car nous ne pourrons plus investir dans des appareils haut de gamme. En ce sens, le revenu du radiologue n’est pas impacté individuellement, mais la santé du patient, oui, car les délais de rdv vont se rallonger. Des équipements moins modernes sont par exemple plus lents et rappelons tout simplement que le forfait technique sert à financer le fonctionnement de l’appareillage et le personnel. Diminuer le forfait revient à diminuer le personnel et donc les heures d’ouverture. Je rappelle que nos tarifs ont déjà baissé de 900 millions et que par ailleurs, l’enquête menée par la FNMR en 2015 sur un échantillon de plusieurs centaines de nos adhérents a montré que 18 % des sociétés qui portent les centres de scanner et 5 % des centres d’IRM étaient déficitaires. Nous avons prévu de renouveler cette enquête d’ici fin 2017, et avec une baisse du forfait technique de 10 %, je ne serais pas surpris de voir ces chiffres grimper à 30 % pour les scanners et exploser pour les IRM.

Jusqu’où êtes-vous prêts à aller dans votre bras de fer avec la CNAM ?

Nous sommes prêts à tout pour obtenir le retrait de l’article 99. Des actions, décidées et présentées cette semaine, démarreront dès mars et pourront se déployer jusqu’au prochain PLFSS.

Comment voyez-vous l’avenir de votre profession ?

Les radiologues sont au centre de la démarche diagnostic. La radiologie est une spécialité structurante indispensable pour maintenir le maillage territorial. Avec cette baisse des capacités d’investissement, la radiologie française va se transformer en radiologie des pays émergents. Or je suis convaincu que les radiologues français sont les meilleurs du monde quand on voit toutes les publications qui sont faites dans les congrès internationaux. Nous n’avons pas à rougir des Anglo-Saxons ou des Coréens. Je ne suis pas inquiet pour l’avenir de la spécialité mais pour l’avenir de la prise en charge du patient. Plus d’une centaine de cabinets ont fermé récemment. Certains radiologues partent à la retraite et ne trouvent pas de successeur. Il n’est pas normal d’attendre un mois pour passer une IRM quand on vient de vous dépister un cancer du sein.

Il faudrait enfin envisager un transfert de l’enveloppe de financement de la chirurgie vers celle de la radiologie interventionnelle, et bénéficier d’un GHS. Notre spécialité, aujourd’hui à l’étroit, ne peut pas se développer. Au fond, est ce que les politiques ont la réelle volonté de soigner les gens ?