Dr Claude Rosenthal, Gynécologue et président de Gynécologues sans frontières (GSF)

Vous avez consacré toute votre vie à soigner les femmes, qu’est-ce qui vous motive, aujourd’hui à la retraite, à persévérer ?

L’amour, la passion de la femme ne s’arrête pas à la retraite. Au contraire, l’humanitaire m’a permis de continuer à me préoccuper de la santé des femmes de façon bénévole. Le paiement à l’acte se fait alors en sourire, prière, visage plein de joie, danse, signes de tendresse. La richesse que l’on reçoit est beaucoup plus grande.

Depuis votre pratique de médecin, pensez-vous que le regard des femmes sur elles-mêmes a changé en France (dans les pays modernes) ?

Oui et Non ! Oui et même à l’extrême. Des mouvements féministes se sont développés. Certains sont même franchement anti-hommes. Le balancier est passé de l’autre côté et ce n’est pas franchement utile. Non pour d’autres et pas forcément dans les situations de précarité. Des femmes acceptent l’inégalité, d’autres les soumissions et subissent des violences. Depuis une quinzaine d’années, des progrès sur l’égalité et dans la lutte contre les violences liées au genre, ont été réalisés mais beaucoup reste à faire pour libérer les 30 % de femmes toujours victimes.

GSF agit principalement hors nos frontières mais aussi sur notre territoire, quels sont les points d’attention sur lesquels vous souhaiteriez alerter vos confrères qui accueillent des femmes dans les services d’urgences, dans les maternités privés ?

Ce n’est que depuis une dizaine d’années que le corps médical a pris conscience des violences faites aux femmes. Avant c’était le silence … Si d’immenses progrès ont été réalisés, beaucoup de travail reste à faire. Tout d’abord dans les services d’urgences, il faut savoir constater et rédiger correctement un certificat médical. Les suites judiciaires vont en dépendre. Puis chaque établissement devrait avoir un référent ‘violences’ formé. Tout le monde n’a pas la connaissance ni le temps de répondre à la conduite à tenir après le diagnostic de violences. Enfin, dans les maternités, lors de l’interrogatoire au cours des grossesses, on doit poser systématiquement la question, « avez-vous subi des violences ? » La violence transforme la grossesse normale en grossesse pathologique.