Travailler sur la pertinence avec les professionnels

La Ministre vient de relancer la question de la pertinence des soins lors des débats du PLFSS 2018, en soulignant que « 30 % des dépenses de l’assurance maladie ne sont pas pertinentes ». L’OCDE soulignait déjà il y a 10 mois, que 20 % des dépenses de santé dans les 35 pays étudiés seraient du gaspillage pur et simple. Mais de quoi parle-t-on exactement ?

Les principes de la pertinence des soins peuvent être résumés sous trois angles d’attaque. Tout d’abord la pertinence vise la problématique de la variation des pratiques médicales : ce qui est fait à tort, mais aussi ce qui n’est pas assez fait. Ensuite la pertinence concerne la iatrogénie, la nature et le volume des prescriptions de biologie, de kinésithérapie, d’imagerie, d’arrêts de travail, de transport, … Enfin la pertinence cible la modalité du traitement et de l’environnement : une prise en charge en chirurgie ambulatoire versus une hospitalisation complète, une prise en charge en urgence évitable, une hospitalisation inadéquate …

L’assurance maladie s’intéresse depuis longtemps à cette problématique. Afin de vérifier si les prises en charge sont justifiées, la CNAMTS a conduit des actions sur la chirurgie ambulatoire depuis 2003 (avec la MSAP depuis 2008), sur la pertinence des actes chirurgicaux depuis 2007 notamment en chirurgie bariatrique, sur l’hospitalisation de jour depuis 2009 ou encore sur les parcours de soins depuis 2012 (PRADO). Mais la démarche de pertinence ne doit pas être un monopole réservé au « financeur des soins ». C’est d’abord et avant tout l’affaire de tous, au premier desquels les patients et les professionnels de santé.

La démarche s’appuie le plus souvent sur l’identification des « atypies » statistiques au regard du contexte donné, mais l’atypie ne renvoie pas systématiquement à une pratique de soins non pertinente. Cela passe donc par la mise en place d’indicateurs adaptés à chacune des pathologies prises en charge, dans laquelle la HAS mais aussi les sociétés savantes ont un rôle essentiel à jouer. Parallèlement, les tutelles ont affiché dès 2015 la volonté de mettre en œuvre un plan d’actions pluriannuel visant à l’appropriation par les professionnels de santé de la démarche. Cette appropriation relève de la responsabilité individuelle mais aussi collective, en donnant une place à la pertinence dans le dispositif de la formation initiale et continue.

Le volet additionnel « pertinence » du nouveau Contrat d’Amélioration de la Qualité et de l’Efficience des Soins (CAQES) s’inscrit dans cette lignée. Son objectif affiché est d’améliorer la qualité et la sécurité des soins, ainsi que l’efficience des dépenses de santé. Dès lors, une obligation de résultat s’impose … à l’établissement, qui n’a pourtant ni la compétence ni la responsabilité des prescriptions ni de la réalisation des actes. Là encore, il faudra que les tutelles associent davantage les professionnels de santé et ne se déchargent pas sur les directions des établissements passibles contractuellement de sanctions financières si l’objectif n’est pas atteint. Car une chose est sûre, la pertinence ne se décrète pas.

Il s’agit donc d’avancer pas à pas, en travaillant la démarche de pertinence avec les professionnels de santé qui réalisent les soins. Et d’appliquer la « nouvelle méthode » prônée récemment par la Ministre : « faire confiance aux acteurs des territoires pour construire des projets et innover ».

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