Qu’apprend-on de la médecine de l’espace ?
Dans le cadre de mes recherches, j’explore la physiologie humaine dans l’extrêmement haut, l’espace, l’extrêmement bas, sous-terre, ainsi que les mécanismes du corps humain soumis à des conditions difficiles, comme le froid extrême. Je suis descendu dans des mines d’or au Ghana, à plusieurs km de profondeur, avec des températures de plus de 45 degrés et un taux d’humidité de 100 %, c’est l’enfer. Je participe actuellement à une expérience avec l’astronaute allemand qui se trouve sur la station spatiale ISS, Alexander Gerst, qui effectue des tests sur les propriétés biomécaniques du muscle humain au repos et à gravité zéro. Les effets observés en six mois reflètent des décennies de changements pour la musculature et le squelette ici sur terre. Nous avons également noté lors d’une précédente mission que le corps humain dans l’espace atteint une température de 38 degrés après 6 à 8 semaines, laissant supposer une inflammation, et qu’il met près de 4 mois à redescendre à 37 degrés une fois sur Terre, ce qui soulève des interrogations pour d’éventuelles futures missions. La médecine de l’extrême, notamment spatiale, est certainement la meilleure médecine préventive que nous puissions avoir, qui peut être mise à profit pour des programmes de rééducation.
Connaissons-nous déjà des environnements extrêmes en Europe ?
Une canicule comme celle que nous venons de vivre dans une bonne partie de l’Europe, est un environnement extrême, auquel il faut s’adapter. Le souvenir de la vague de décès en France en 2003 reste très présent et a montré combien il est important de former les futurs médecins aux conditions climatiques extrêmes. On commence à reparler de thermorégulation, alors qu’elle avait quasi disparu du cursus des études de médecine. Lors de fortes canicules, les personnes âgées en particulier sont en danger, car elles ont tendance à oublier de boire. Une personne active peut perdre 6 ou 7 litres de fluide en une journée de forte chaleur. Une perte d’une dizaine de litres peut entraîner la mort. Donc si la vague de chaleur n’est pas annoncée à l’avance, l’effet de surprise peut entraîner de nombreux décès. Aux aléas climatiques s’ajoutent des facteurs connexes, sociologiques, tel l’isolement, notamment des personnes âgées en ville.
Des populations devront-elles migrer ?
Nous planifions une étude pluri-disciplinaire sur le changement climatique et les effets sur la santé dans la région sub-saharienne. Les effets du changement climatique risquent d’empêcher les populations dans des territoires aussi vastes que la Chine, les USA ou l’Inde de vivre et de travailler, accentuant ainsi les mouvements migratoires que nous connaissons déjà. Nous devons explorer les conditions environnementales de la région sub-saharienne très précisément, suivant les saisons, les heures de la journée, et définir les capacités physiques de ces populations, mieux habituées que les populations du nord à ces conditions climatiques extrêmes.