À l’horizon de la loi « Ma Santé 2022 », un amendement donnant plus de pouvoir à la pratique officinale a été déposé par Thomas Mesnier, député LREM et médecin urgentiste. Si un texte similaire avait été rejeté par les députés en octobre 2018, le décret a officiellement été voté le 21 mars dernier. Il permet ainsi de délivrer certains médicaments sans ordonnance pour prendre en charge certaines pathologies dites « de petite urgence » et pouvoir « dépanner » les français notamment lors du week-end.
Les pathologies bénignes concernées
Carine Wolf-Thal, Présidente de l’Ordre des Pharmaciens, est à l’origine de cette proposition à l’issue d’une consultation sur les enjeux de santé. Le fait de permettre aux officinaux de délivrer certains médicaments sans ordonnance est alors une réponse possible. La Présidente s’appuie sur un constat simple pour justifier cette mesure :
« En cas de petite urgence, il est souvent difficile pour les Français d’avoir accès à une solution hormis d’aller aux urgences quand un médecin traitant n’est pas disponible »
Sollicitée par le @MinSoliSante , j’ai lancé une consultation auprès des #pharmaciens dans le cadre du #GrandDebatNational pour recueillir leur avis sur les enjeux de santé. ➡️ https://t.co/n4wKMk7SLA
— Carine Wolf-Thal (@CarineWolfThal) 19 février 2019
Même si la liste complète des pathologies reste à déterminer, cette mesure est d’abord destinée à traiter les cystites, conjonctivites, angines ou l’eczéma. En revanche, le texte énonce que pour les pathologies les plus sévères, les traitements seront délivrés en accord avec le médecin traitant.
Un bon moyen de désengorger les services hospitaliers en donnant une plus grande liberté aux pharmaciens, à condition de codifier et d’encadrer cette mesure. Pour ce faire, les pharmaciens devront appliquer un protocole précis et suivre une formation adaptée qui n’est, pour l’heure, toujours pas définie.
Opposition des syndicats médicaux
Face au vote de cet amendement, une frange de professionnels hausse le ton et s’oppose à cette nouvelle pratique. Jean Paul Hamon, président de la FMF, pense qu’il s’agit d’une mauvaise nouvelle pour la prise en charge du patient :
« Une cystite est simple, une angine est simple une fois que je l’ai examinée. On dégrade les conditions de prise en charge des patients, c’est tout ».
L’adoption de ce texte de loi serait également un risque mettant à mal les contours de l’activité du médecin généraliste. Cette mesure revient à donner au pharmacien la responsabilité du diagnostic et de la prescription médicale. Les principaux syndicats médicaux craignent notamment une mise en danger de la santé du patient en cas d’erreur de prise en charge.
De plus, le corps médical redoute un manque de traçabilité que pourrait prendre ce nouveau système. Si le patient ne va pas mieux après la délivrance d’un médicament sans ordonnance, le médecin n’aura pas forcément toutes les informations médicales.
Cette pratique permettra in fine de développer les compétences des officinaux pour assurer un meilleur suivi et compléter l’activité du médecin. Pour Gilles Bonnefond, Président de l’USPO, chacun sera à sa place :
« Les médecins sont spécialistes du diagnostic. Nous, nous ne savons pas faire et ne le revendiquons pas. Nous sommes spécialistes du médicament. On peut donc être à l’initiative de traitements, garantir le bon usage et assurer le suivi du patient.