1,2, 3 Questions – Ségolène Benhamou

Ségolène Benhamou, PDG de l’Hôpital Privé Nord Parisien – Sarcelles (95)

« Le salaire, c’est pour venir. La qualité de vie au travail, c’est pour rester. »

Depuis 10 ans, vous avez mis en place une démarche de mesure de la qualité de vie au travail, quel bilan faites-vous ?

Au départ nous avons eu des réticences, la crainte que l’enquête soit utilisée à mauvais escient par certains, mais aussi celle de se confronter aux résultats. Puis nous nous sommes appropriés l’outil et très vite mesurer, comme la satisfaction des patients, est devenu un indicateur comme un autre.

Nous sommes accompagnés par l’agence Primum Non Nocere et utilisons leur baromètre B2ST (Bien-être, santé et sécurité au travail). Le questionnaire est anonyme et les salariés précisent simplement leur service, ce qui est indispensable pour les motiver à répondre et permettre l’exploitation des résultats. Le ressenti des professionnels du bloc opératoire est différent de celui de la pharmacie ou de celui des ASH. 211 salariés ont répondu au dernier questionnaire de février 2021, soit plus de 50 % de répondants, ce qui nous permet d’avoir la vision des professionnels de terrain de tous les services, au-delà du dialogue avec les Représentants du personnel qui s’en trouve enrichi.

Mesurer au plus près et en direct ce ressenti est devenu indispensable, car il est difficile de fidéliser les équipes et de les motiver sur la qualité des soins si elles ne se sentent pas bien dans leur travail. C’est une marque de considération pour les salariés, qui y trouvent le moyen de nous faire passer des messages sur leurs satisfactions, leurs difficultés et leurs priorités. C’est aussi un outil de management, qui nous permet de mieux piloter l’encadrement et prioriser le soutien à apporter à tel ou tel service. Pour une population qui a le choix de trouver du travail où elle veut, le salaire c’est pour venir, la qualité de vie au travail c’est pour rester.

Que mesurez-vous dans cet observatoire B2ST ?

Ce qui est très intéressant pour nous, c’est qu’à la fois nous pouvons mesurer le sentiment global de satisfaction des professionnels dans chaque service, mais aussi si le salarié est informé de la politique générale de l’établissement, s’il adhère à ses valeurs, s’il connait les objectifs de son service et les partage. Nous avons également son ressenti sur ses conditions de travail, puisqu’il est interrogé sur les moyens matériels mis à disposition, le temps nécessaire pour faire son travail, l’aide fournie par son supérieur direct, les moyens d’évoluer en termes de formation, la satisfaction du service RH, etc.

Ce questionnaire permet au dirigeant d’évaluer la politique RH, les responsables service par service, ou encore la politique globale d’amélioration des conditions de travail. Grâce à cette enquête, nous avons pu identifier des problèmes que nous n’avions pas vus, et nous n’avions pourtant aucun retour négatif de la part des encadrants. L’outil B2ST a permis de tirer la sonnette d’alarme, c’est un excellent outil d’anticipation de gestion de crise sociale et d’évitement de démissions ou d’arrêts de travail. Si cela va mal dans un service, on le verra dans les résultats de l’enquête.

Parallèlement, B2ST permet d’attirer notre attention sur des aspects que nous n’estimons pas a priori prioritaires. Par exemple, l’enquête a fait ressortir l’importance pour les salariés de disposer d’une salle de pause par service, même si elle est petite. Les résultats montrent tous les ans que les gens apprécient beaucoup leurs collègues et se sentent à leur place dans leur service, il y a vraiment un sentiment d’appartenance par service. L’attente n’était pas celle de grands espaces communs mais d’un cocon par service.

Comment les résultats sont-ils présentés, puis exploités ?

Chaque année, il y a d’abord une restitution à la direction par l’agence Primum Non Nocere, puis nous présentons l’intégralité des résultats à l’encadrement. Les cadres disposent des résultats détaillés par service, avec comparaison par rapport à ceux de l’année précédente. Chaque responsable le présente ensuite à ses équipes et entame un dialogue avec elles, en particulier sur les items marquants : ici nous avons une amélioration suite à telle action ; là ça ne va pas donc que mettons-nous en place, qu’est-ce qui selon vous est le plus important ? L’objectif est de construire le plan d’action avec chaque service, en identifiant avec les professionnels du service quelques actions d’amélioration qui leur semblent prioritaires. Ces actions sont intégrées, après validation par la direction, dans le plan d’actions général d’amélioration de la qualité de l’établissement.

Les résultats de B2ST sont également présentés aux représentants du personnel qui sont très favorables à la démarche et tiennent absolument à ce volet QVT dans les NAO. Car un salarié qui se sent bien va rester dans l’établissement.