Le microbiote intestinal : aussi impliqué dans la Covid ?

Si le système respiratoire est la première cible du SARS-CoV-2, d’autres organes sont également impactés. C’est en particulier le cas de l’intestin, au point que certains n’hésitent pas à suggérer qu’il puisse être une voie potentielle de dissémination du virus. Qu’en est-il donc des troubles gastro-intestinaux, et surtout quel est le rôle du microbiote intestinal sur les symptômes et éventuellement sur la gravité de la COVID ?

Des symptômes gastro-intestinaux fréquents, bien qu’assez peu médiatisés

Le SARS-CoV-2 infecte les cellules en se liant notamment à un récepteur (ACE2), que l’on retrouve au niveau du tissu pulmonaire, mais aussi au niveau du cœur, du foie et de l’intestin. Ainsi, le système digestif pourrait bien être une autre porte d’entrée du virus. La présence du SARS-CoV-2 a en effet été signalée dans les échantillons de selles de personnes infectées par le virus : environ 50 % des personnes infectées rejettent le virus par les selles trois ou quatre jours avant même les premiers signes cliniques. Cette donnée a d’ailleurs très précocement été utilisée avec succès dans de nombreuses grandes villes pour traquer l’évolution de la pandémie par l’analyse des eaux usées. Dans l’intestin, l’infection déclenche une réaction inflammatoire, mise en évidence par la présence d’un marqueur à des taux élevés. Fièvre, toux, fatigue et dyspnée sont les symptômes les plus courants de la Covid-19, mais les symptômes intestinaux (vomissements, nausée, diarrhée) sont présents chez environ 18% des patients. Les chercheurs ont par ailleurs remarqué que les symptômes intestinaux semblent plus fréquents dans les formes sévères de la Covid 19.

Une modification du microbiote observée lors de l’infection à SARS-CoV-2 

Le microbiote est l’objet d’intenses recherches depuis quelques années. Il a été observé que de nombreux virus, comme celui de la grippe ou le virus respiratoire syncytial, modifient significativement la composition du microbiote intestinal, en raison de son rôle immunitaire. Dans le cas de la COVID-19, la composition du microbiote intestinal de certains patients atteints semble perturbée, présentant un nombre inférieur de bactéries bénéfiques comme les Lactobacillus et Bifidobacterium. En observant que certains patients continuaient à souffrir de nombreux symptômes même lorsque leurs tests PCR se révèlent négatifs (Covid long), les chercheurs ont émis l’hypothèse que le microbiote intestinal restait anormal chez ces patients après la guérison, ce qui a été confirmé par leurs études. Cette altération reste significative, que les patients aient été traités ou non par antibiotiques.

Les mécanismes en jeu : la piste inflammatoire 

On sait déjà que l’altération du microbiote peut influer sur les pathologies inflammatoires intestinales (maladie de Crohn, rectocolite hémorragique), mais aussi en dehors de la sphère intestinale. C’est notamment le cas dans le syndrome métabolique où il a été démontré que certaines molécules microbiennes passent dans le sang périphérique, activent les macrophages dans le foie et dans la graisse périphérique, jouant un rôle dans cet état microinflammatoire. Dans le cas de la Covid 19, les bactéries qui voient leur population augmenter ont des fonctions métaboliques pro-inflammatoires tandis que les bactéries dont la population diminue ont plutôt des fonctions métaboliques anti-inflammatoires. L’hypothèse est ainsi que les modifications observées jouent un rôle dans l’exacerbation de la maladie en contribuant à la dérégulation de la réponse immunitaire, ce qui semble confirmé par des modifications constatées dans la concentration en cytokines et chimiokines dans le plasma sanguin, en marqueurs d’atteintes tissulaires, avec un lien potentiel avec la sévérité de la maladie. La façon dont le SARS-CoV-2 impacte le microbiote reste cependant à l’étude et aucune certitude n’a pour l’instant pu être obtenue.

Quelles solutions en pratique ? 

Devant une modification du microbiote potentiellement corrélée à des troubles graves, la question de l’opportunité de réaliser des transplantations fécales se pose naturellement. Actuellement une seule équipe, chinoise, est en train d’évaluer la transplantation de microbiote fécal dans les formes réfractaires/graves de COVID. Peut-être trouvera-t-on là également une réponse à ces très nombreux cas de symptômes post-Covid qui n’en finissent plus, avec des manifestations digestives mais aussi extra-digestives.

Quoi qu’il en soit, un microbiote équilibré favorise la bonne santé de notre système immunitaire et permet de lutter plus efficacement contre les attaques virales. Il est donc logique de penser qu’un microbiote intestinal sain pourrait aider à prévenir les réactions immunitaires pro-inflammatoires dans les poumons et autres organes vitaux infectés par la COVID-19. Le mieux est ainsi de prendre soin de sa santé intestinale avec des apports alimentaires riches et variés en fruits, légumes, fibres, céréales et noix.

Sources