1,2, 3 Questions – Amah Kouevi

Amah Kouevi – directeur de l’Institut français de l’expérience patient

Y a-t-il nécessité pour les représentants des usagers à s’engager davantage aujourd’hui ?

Globalement, dans la droite ligne de ce qui existe depuis 2002 dans la gouvernance du système de santé, les associations et représentants d’usagers ont aujourd’hui une place reconnue et effective. Beaucoup de progrès ont été faits ces dernières années. Cependant, un diagnostic que nous faisons au sein de notre association et qui est conforté par les échanges que nous avons avec les représentants d’usagers sur le terrain, est qu’un double enjeu de crédibilité et de légitimité des représentants des usagers vis-à-vis des professionnels de santé persiste. Ainsi, la valeur ajoutée et les prérogatives des représentants des usagers sont encore aujourd’hui questionnées au sein des établissements de santé.

Est-ce que la crise sanitaire a fait évoluer les choses ?

Pendant la crise sanitaire, à l’échelle nationale, les associations de patients, la Ligue contre le cancer… ont eu voix au chapitre et ont trouvé des interlocuteurs réceptifs, qui ont concouru à faire bénéficier les patients et leurs proches de mesures adaptées et bénéfiques. Nous avons néanmoins assisté à une verticalisation de la décision pendant cette période, ce qui finalement est révélateur d’une culture qui n’est pas suffisamment ancrée dans la collaboration avec les représentants des usagers.

Étant donné que la volonté de collaborer n’a probablement jamais été aussi forte, les représentants des usagers ont une opportunité dont ils peuvent se saisir pour déplacer le curseur de la défense des droits vers une participation plus active à l’amélioration de la qualité de prise en charge. L’expérience patient est de ce fait un bon « terrain de jeu » pour les y aider et exercer une coopération accrue avec des professionnels de santé.

De quelle manière concrètement ?

L’expérience patient repose sur la perspective des usagers, les témoignages des usagers, la manière dont est matérialisé ce que les usagers vivent. Participer, cela signifie donc faciliter la collecte de l’expérience et l’analyse collective. Il faut ensuite arriver à transformer tout ça en actions, qui vont concourir directement à l’amélioration des prises en charge. Les ruptures dans les parcours causent des problèmes aux usagers, qui ne sont pas toujours perçus de l’autre côté du système de santé.

Les représentants des usagers ont la prérogative de participer à l’élaboration de projets des usagers – et non pas de projets des représentants des usagers -, il y a une nuance. Cette nuance est importante, parce que l’enjeu c’est d’asseoir la participation des représentants des usagers sur la collaboration avec les usagers eux-mêmes. C’est ce qui confère aux représentants des usagers une légitimité et une crédibilité dans leurs interactions avec les professionnels de santé. Il est important de s’appuyer sur les usagers, qui peuvent apporter une participation, parfois ponctuelle, dépendant de l’objectif du projet. La manière dont les usagers et les représentants des usagers peuvent s’engager est donc très hétérogène

L’Institut français de l’expérience patient et France Assos Santé ont publié un guide « S’engager pour améliorer l’expérience patient », un petit fascicule de 4 pages qui, en des termes assez simples, expose à la fois ce que sont les enjeux de l’expérience patient aujourd’hui et la manière dont les représentants des usagers peuvent s’en emparer.