1,2, 3 Questions – Eric BLONDET

Dr Eric BLONDET, président URPS Médecin Libéral en Bourgogne Franche-Comté

J’appelle de mes vœux un partenariat réel entre les FHP régionales et les URPS

Vous interveniez au congrès de la FHP à Montpellier sur les territoires en santé, comment l’URPS-ML que vous présidez participe-t-elle à la coordination des soins ?

La loi nous donne une mission de participation à l’élaboration, de mise en œuvre et de suivi régional des politiques de santé. En Bourgogne Franche-Comté, nous inscrivons nos actions sur une analyse des besoins, en priorité sur les actes à fort volume. La question fondamentale est : en fonction de mon lieu de résidence, vers quel établissement serai-je orienté ? Nous analysons les habitudes de recours et élaborons ainsi une cartographie territoriale du 2e recours qui nécessite un plateau technique lourd. Où placer les consultations avancées pour éviter les ruptures d’accès aux soins ? Nous prenons en compte également les durées de séjour via les dispositifs de prise en charge en ambulatoire et de RAAC, qui vont de pair avec une sécurisation des liens forts entre les intervenants à domicile et l’équipe chirurgicale. Il vaut mieux bénéficier d’une chimiothérapie à proximité du domicile et organiser une ou deux consultations par an avec le centre expert plutôt que de tout centraliser, ce qui est l’échec assuré. Ensuite, nous regardons où sont les solutions de 3e recours pour des spécialités rares, par exemple la chirurgie cardiaque ou intra-crânienne. Cette approche permet d’ajuster l’échelle des CPTS, le périmètre des politiques de prévention en fonction des particularités territoriales, mais aussi d’identifier les risques démographiques pan par pan de l’offre de soins dans chaque territoire. Nous sommes très pragmatiques et très intégratifs des composantes concernées par ces enjeux.

Comment l’URPS-ML agit-elle sur la démographie médicale ?

Dans un contexte de rareté professionnelle et de refonte du périmètre de certaines spécialités, par exemple la gynécologie médicale, notre rôle est majeur. Je déplore toutefois un manque de considération pour les CME, pourtant en charge du projet des établissements, lors de certaines réunions à l’initiative de nos instances de tutelle, mais aussi une trop faible implication desdites CME dans les travaux sur ces enjeux.

Nous avons accès à différentes bases (SNIIRAM, PMSI, RPPS, …) pour analyser l’activité de soins et disposer d’une vision à peu près à jour de la démographie médicale. En Bourgogne Franche-Comté, nous les exploitons par actes sous forme de cartographie projetée sur un territoire, par exemple sur la prothèse totale du genou : où sont les chirurgiens orthopédistes, quelles sont les données démographiques de la population, les habitudes de recours… ?

Également, l’URPS-ML vient en soutien des praticiens en apportant des éléments de diagnostic, proposer et accompagner de nouvelles organisations d’exercice afin d’optimiser le temps médical, soutenir des travaux de recherche, d’enseignement…

L’URPS-ML n’a pas de mission juridique, en revanche elle peut intervenir comme conseil pour ses mandants et dispose d’élus affutés pour relire un contrat, apporter un éclairage sur un changement de mode d’exercice, de recrutement…

L’URPS-ML n’est pas là pour se substituer aux acteurs mais les accompagner dans leur projet médical ou leur activité. J’appelle de mes vœux un partenariat réel entre les FHP régionales et les URPS-ML pour répondre aux enjeux des PRS et optimiser notre offre à la population.

Selon vous, comment l’innovation aide-t-elle une meilleure coordination des soins ?

L’innovation seule ne sauvera pas le système de santé si elle ne s’inscrit pas dans une dynamique et volonté de répondre aux enjeux qui le traversent, avec une réelle considération pour les usages. Pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on vient. Par exemple, la télémédecine est une prise en charge en mode dégradé dans le sens « gestion de crise » du terme, c’est-à-dire qu’on va s’adapter ou prévenir une rupture d’accès aux soins ou de parcours de soins.

En tant que neurochirurgien, quand je suis sollicité pour une consultation en télémédecine, je m’assure d’être en mesure d’assurer une présence soit au lit du patient, soit au domicile, soit en cabinet dans les délais requis par des éléments potentiellement détectés au cours de l’acte de télémédecine. C’est fondamental et cela impose une territorialisation de l’organisation. Un mode dégradé peut être acceptable s’il est anticipé, organisé et s’intègre dans un parcours de soins et une logique de prévention de rupture. Les conditions humaines et techniques nécessaires à un acte de télémédecine sont-elles réunies ? Cette consultation nécessite un accompagnement du patient qui peut être un pharmacien d’officine, un infirmier, un kiné, un pair aidant, puis les outils doivent être performants pour recueillir des données cliniques. Alors, la télémédecine assistée, augmentée, offre un cadre sécurisé et s’inscrit dans une organisation de territoire indispensable pour assurer les recours dans une logique de parcours optimisé.

L’URPS Médecin Libéral en Bourgogne Franche Comté organise un colloque les 14 et 15 octobre prochains : « L’exercice libéral à l’aune de l’enjeu des territoires ».

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