1,2, 3 Questions – Alexandre BERKESSE

Alexandre BERKESSE, Chargé de mission « Partenariat et expérience patient » aux Hospices Civils de Lyon et Directeur Europe au Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public (CEPPP)

Patients partenaires, représentants des usagers, quelle différence ?

Les deux sont des acteurs de la démocratie en santé mais le premier y contribue de manière directe (via la participation en tant qu’individu, à partir de son expérience de soin) et le second de manière indirecte (via la représentation des usagers du système de santé et donc l’expérience de soin des autres).

Le premier tire sa légitimité de son expérience de soin significative, le second de son appartenance associative, de sa désignation à cette fonction par l’ARS et de son activité de représentation de l’expérience de soin des usagers dont il porte et défend les intérêts.

Le rôle de représentant des usagers est exigeant et requiert de nombreuses compétences ainsi que d’y consacrer un temps significatif que plusieurs n’ont pas. Les représentants des usagers doivent par exemple effectuer un travail d’interaction perpétuelle avec les patients pour recueillir leurs besoins et expériences et ainsi porter l’intérêt général plutôt que des intérêts restreints à quelques patients rencontrés par-ci par-là.

Là où les deux rôles peuvent être complémentaires, c’est par exemple si le patient partenaire facilite cette remontée d’expérience de la part de ses pairs (d’autres patients ayant eu des expériences similaires aux siennes et qui se sentiront alors plus à l’aise de s’exprimer entre pairs) et nourrit le travail des représentants des usagers.

Depuis que je suis engagé au développement de ces pratiques, depuis 2010 au Canada et depuis 2019 en France, je constate que, la plupart du temps, les patients partenaires sont, au départ, sollicités pour pallier des enjeux que veulent résoudre les professionnels (ex : la non observance au traitement) plutôt que pour répondre aux besoins des patients. Ou encore, ils sont sollicités pour se substituer au rôle des représentants des usagers avec lesquels les professionnels ont localement des difficultés à coopérer. Or, la légitimité et les compétences de chacun ne sont pas les mêmes et ne doivent pas être confondues. On ne vient pas chercher l’expérience personnelle d’un individu pour la même raison que l’on sollicite une personne qui mobilise les besoins et expériences agrégées des autres (pour contribuer au mieux à l’intérêt général).

La première question que nous devons nous poser est : quel type de contribution souhaitons-nous ? Quel type de légitimité cherchons-nous : la légitimité d’avoir personnellement ou via un proche vécu une expérience de soin ou une personne qui représente la diversité des expériences vécues au sein d’un parcours de soin ?

Quelles sont les missions du département Partenariat et expérience patient aux HCL ?

La mission Partenariat et expérience patient consiste à accompagner les équipes de professionnels des HCL à favoriser l’engagement des patients dans les soins et des patients partenaires dans l’organisation des soins. Notre objectif est de faciliter la coopération entre les patients partenaires, les représentants des usagers et les professionnels de santé pour répondre aux défis des patients dans leurs expériences du soin.

Par exemple, parmi la trentaine de projets accompagnés depuis 2019, nous accompagnons une équipe de chirurgie ORL à intégrer dans l’équipe des patients partenaires ayant déjà fait l’expérience des interventions dans le service afin d’accompagner les nouveaux patients sur des dimensions que les professionnels abordent moins ou avec moins de légitimité expérientielle (ex : vie affective sexuelle, retour au travail, qualité de vie au quotidien, etc.), le tout de manière coordonnée avec le travail de l’équipe de professionnels.

Une approche territoriale est-elle envisagée ?

L’autre territoire au sein duquel je suis engagé est la Bretagne. Dans cette région, nous travaillons depuis des années à favoriser ce même état d’esprit de coopération entre patients partenaires, représentants des usagers et professionnels de santé, mais à l’échelle de la région.

En partenariat avec France Assos Santé Bretagne (responsable de la formation et de l’accompagnement des représentants des usagers), les chargés de mission « Partenariat et expérience patient » de la structure régionale d’appui à la qualité et à la sécurité des soins (CAPPS Bretagne) accompagnent l’ensemble des professionnels de santé du territoire (CH, CHU, MSP, facultés, etc.) à structurer, opérationnaliser et évaluer ces initiatives d’engagement des patients dans les soins (pair-aidance, éducation thérapeutique, etc.), dans l’organisation de soins (amélioration de la qualité, de la sécurité, de la pertinence, etc.), la formation initiale et continue ainsi que la recherche en santé.