1,2,3 Questions – Patricia Tassin

Patricia Tassin, directrice de la Clinique Victor Hugo, Le Mans (72)

Le 6 octobre 2023, la Clinique Victor Hugo, le Centre Hospitalier du Mans et le Centre Jean Bernard inauguraient le Centre de Cancérologie de la Sarthe pour une prise en charge commune des cancers.

Comment ce projet est-il né ?

Installée en centre-ville, la Clinique Victor Hugo est spécialisée en cancérologie depuis 1967. Elle travaille en partenariat étroit, sur le même site, avec le Centre Jean Bernard qui assure la radiothérapie. Pour répondre à l’évolution de l’activité et maintenir la qualité de la prise en charge, la clinique et le Centre Jean Bernard envisageaient une installation dans de nouveaux locaux.

Sur le terrain, la coopération en cancérologie entre les équipes médicales de la clinique et du centre hospitalier était effective puisque seul le Centre Jean Bernard dispose de l’autorisation de radiothérapie pour la Sarthe. Ainsi, les patients de l’hôpital se déplaçaient sur le site Victor Hugo / Jean Bernard pour la prise en charge en radiothérapie. Progressivement, les discussions médicales entre les praticiens en cancérologie des trois structures ont fait naître l’idée d’un centre unique pour la prise en charge des cancers.

Quelles ont été les principales étapes du projet ?

En mars 2016, un accord de méthode entre le centre hospitalier, la clinique et le centre de radiothérapie a entériné le regroupement sur un site unique des moyens. Le projet médical a été rédigé en 2018. L’ARS nous ayant imposé la création d’une entité unique, le statut juridique adéquat fut complexe à définir. Pour le bâtiment d’hospitalisation, nous avons abouti à la création d’un groupement sanitaire (GCS) de construction de statut privé. Nous avons également constitué un GCS entre nos trois structures pour mutualiser des moyens de fonctionnement (bionettoyage, brancardage…).

Pour la construction et l’aménagement des bâtiments, l’appel à candidatures passé en 2019 a été mené selon les règles du droit public. C’est en mars 2020, durant le premier confinement, que l’ensemble des auditions ont été réalisées en visio. Dès septembre 2020, des groupes de travail mêlant les représentants des secteurs public et privé ont rédigé le cahier des charges. Chacune des parties a amené son savoir-faire pour concevoir ensemble un bâtiment optimal.

Le 3 mai 2021, les travaux ont démarré pour s’achever le 21 décembre 2022. Sans aucun retard malgré les épisodes Covid et les ruptures de stock. Une prouesse ! L’emménagement s’est déroulé le 30 janvier 2023.

Quels sont les enseignements que vous en tirez ?

Les cultures publiques et privées sont très différentes en matière de réglementation, d’organisation des relations de travail… et la phase de préparation qui a permis d’apprendre à travailler ensemble a été très importante.

La mise en place d’un système informatique commun a été complexe. En santé, l’informatique gère les admissions, les dossiers patients, la pharmacie et le suivi des traitements en chimiothérapie. Actuellement, les admissions sont gérées par chacune des parties de manière autonome avec des logiciels différents, mais pour les dossiers patients, la clinique a adopté le même logiciel que l’hôpital.

L’autorisation de pharmacie et de préparation des chimiothérapies a été attribuée au groupement de coopération sanitaire (GCS). C’est pourquoi, les personnels de la clinique et de l’hôpital ont été mis à la disposition du GCS et ont appris à travailler ensemble avant même l’installation dans les nouveaux locaux. Au 1er étage, entre les deux ailes de chimiothérapie : l’une privée et l’autre publique, la pharmacie reconstitue les poches de chimiothérapie et les distribue directement aux postes de soins. L’équipe commune est exemplaire dans l’efficacité de sa collaboration.

Même si tout au long du projet, certains ont eu du mal à se projeter, la coopération demeure en tous points bénéfique. Les soignants disposent d’outils de travail performants et modernes. Les patients bénéficient d’un parcours fluide sur un seul lieu. Ce regroupement permet aussi de dynamiser la recherche et les essais cliniques menés par l’ensemble des chercheurs en cancérologie des établissements.