Pr Jean-Michel CONSTANTIN, Président de la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR)
Comment définir la médecine périopératoire ?
La médecine périopératoire correspond à ce qu’il y a avant, pendant et après une intervention, qu’elle soit chirurgicale ou non. La médecine périopératoire, c’est identifier les patients les plus à risque de complications, voire de décès, pour leur proposer un « programme personnalisé ». Elle prépare le patient pour qu’il soit dans une condition optimale et que l’intervention se déroule correctement lorsque c’est nécessaire, mais aussi prévoir le parcours postinterventionnel adapté à l’acte et au patient. Le risque lié à l’anesthésie est infinitésimal, cependant la littérature scientifique indique que la mortalité postopératoire est relativement importante : 4 % en France 4,2 millions de décès par an dans le monde (Global burden of postoperative death, The Lancet Vol 393 February 2, 2019). C’est pourquoi, la SFAR s’est saisie de la problématique pour tenter de réduire cette mortalité. La médecine périopératoire est un enjeu de santé publique.
Les états généraux de la médecine périopératoire se sont déroulés en juin 2025, quels en sont les objectifs ?
L’objectif est de rassembler les professionnels de l’anesthésie-réanimation-médecine périopératoire, puisque c’est depuis quelques années le nom officiel de notre spécialité, les médecins interventionnels, les généralistes, les gériatres mais aussi les tutelles et les directeurs d’établissements de santé pour dresser un bilan, faire reconnaître et valoriser cette activité et proposer une feuille de route.
Il s’agit d’une activité hospitalière mais pas uniquement. En effet, l’objectif de 80 % d’ambulatoire fait que les patients quittent l’établissement immédiatement après l’acte. C’est pourquoi des pistes pour coordonner la relation ville / hôpital en imaginant de nouveaux métiers dédiés au périopératoire, et de nouvelles filières, doivent être proposées.
La médecine périopératoire nécessite de personnaliser la prise en charge. Chez un patient sportif, elle s’attachera à assurer une analgésie efficace et une reprise rapide de l’activité physique. Alors que chez un patient âgé, avec des pathologies associées (insuffisance cardiaque, troubles respiratoires…), une préparation préopératoire et une optimisation postopératoire devront être intégrées dans le parcours de soins. En ce sens, les états généraux ont soulevé la nécessité de flécher les parcours et d’identifier les patients à risque. L’hospitalisation de jour pour la préhabilitation, l’orientation vers des filières de soins critiques, ou encore le suivi en soins médicaux et de réadaptation (SMR) après l’intervention, figurent parmi les pistes de réflexion.
Quels sont les projets à court et à moyen terme de la médecine périopératoire ?
Les états généraux ont souligné que l’intégralité des professionnels de santé impliqués dans le parcours interventionnel ou chirurgical devaient être sensibilisés à la prise en charge périopératoire des patients. Cette pratique doit être reconnue et valorisée. À moyen terme, il sera nécessaire de créer un statut de coordinateur de parcours patient, probablement via la notion de pratique avancée. La réflexion et la mise en œuvre nécessitent une coordination et la SFAR confirme que l’ensemble des parties prenantes sont prêtes à se mobiliser, à condition d’être accompagnées.
L’objectif principal de la médecine périopératoire est de réduire la mortalité postopératoire, estimée à 150 000 décès par an. Collectivement nous n’avons pas d’autre choix que de travailler ensemble et de réussir, tant ce fardeau est important pour la société.