3 questions à Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF)


L’automne sera chaud !

Comment avez-vous réagi à l’annonce de la stratégie nationale de santé le 19 juin dernier ?

Pour nous, la stratégie nationale de santé équivaut à une mise au pas à marche forcée de la médecine libérale. Le service territorial de santé au public est censé être au service de la population, mais il n’aura qu’un maître d’œuvre : l’hôpital public, qui devient tentaculaire ; et qu’un seul chef d’orchestre : l’ARS. C’est se donner les moyens de s’enfermer encore plus dans des lourdeurs bureaucratiques et c’est absolument l’inverse de ce qu’il faudrait mettre en place. Pourquoi ne pas partir de ce que les professionnels de terrain ont à proposer ? Nous aurions souhaité une logique ascendante de terrain, pour adapter l’efficience et la performance au maillage territorial, et remonter ensuite vers les structures de référence. Imposer par le haut aux professionnels de santé des directives encore plus contraignantes est une erreur.

Vous mettez aussi en lumière les aspects dogmatiques de la stratégie nationale de santé. Dans quelle mesure ?

Les textes sont sans ambiguïté : ils indiquent que le service public hospitalier est incompatible avec la possibilité de compléments d’honoraires. Si un établissement privé veut être reconnu comme faisant partie du service public hospitalier, l’ensemble de ses praticiens n’aura plus la possibilité de facturer des compléments, y compris si le patient est transféré vers un autre établissement. Or, le service public hospitalier donnera certainement droit à des allocations de ressources supérieures. Il ne faut pas se leurrer : les conséquences vont être lourdes à la fois pour la médecine libérale et pour le secteur privé hospitalier, puisque nous sommes, de fait, exclus du service public hospitalier.

Dans quel état d’esprit se trouve la CSMF face à ces menaces ?

Nous sommes actuellement dans une phase de présentation de projets de loi aux différentes parties concernées. Le début du mois de juillet se prête mal à l’action publique. Mais ce qui est clair, c’est que si les textes n’évoluent pas de façon majeure, nous allons vers une période de conflits durs. Ce n’est d’ailleurs pas la seule cause : les grilles tarifaires suffiraient à elles seules à entraîner une vive réaction. En tout état de cause, on peut s’attendre à un automne chaud !